Patrimoine bâti


Espace plat où les altitudes restent très proches du niveau de la mer, le sol de la Camargue, principalement constitué d’alluvions, n’offre pas de pierres et peu de grands arbres pour le bois d’½uvre.
Restées pendant longtemps une architecture d’abri et de refuge pour les plus humbles, les techniques vernaculaires (cabanes de gardian et abris de bergers) ont utilisé les matériaux plus éphémères que leur offraient le milieu naturel : la terre pour les murs, les petits troncs pour la charpente et la sagne - chaume de roseau - pour la couverture.
Les matériaux de construction durables, notamment la pierre de Fontvieille, ont dû être importés à grand frais par voie navigable. Leur utilisation est historiquement limitée aux mas, aux ouvrages défensifs ou religieux.
Le Camargue possède donc un patrimoine bâti discret et disséminé composé de mas,  d’églises, de tours de guet, de phares, de châteaux.

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Les mas

Les mas représentent une partie importante des édifices bâtis de Camargue, désigne à la fois le domaine agricole et l’ensemble des bâtiments agricoles.
Implantés le long du petit et du grand Rhône ou en hauteur sur les bourrelets alluviaux, les mas sont souvent cachés derrière des bosquets qui les isolent du vent.

La paix revenue en Camargue après les guerres de Religion (1562-1598) permet la relance de l’agriculture et la construction de la plupart des grands mas actuels qui se développent aux 16e, 17e et 18e siècles.

Les corps de logis sont construits selon un axe est-ouest, offrant ainsi leur façade au sud. Les bâtiments sont plus souvent déployés soit sur un seul front avec des éléments en avancée comme le pigeonnier soit organisés en U plus ou moins ouvert.
Autour du corps de logis, et de l’écurie, se trouvent les dépendances qui étaient autrefois indispensables à la vie domestique — pigeonnier, poulailler, cochonnier, four à pain, puits et/ou noria… — ainsi que les bâtiments utilisés aux différentes phases de l’agriculture camarguaise (bergerie pour l’élevage extensif du mérinos d’Arles, immenses caves à vin de la fin du 19e au milieu du 20e, hangars pour les machines liées à la riziculture depuis 1945…

L’évolution des techniques a influencé et modelé les structures bâties par la nécessité d’ajouter des bâtiments attenants au mas. Ainsi, les mas d’aujourd’hui nous offrent le reflet de cette évolution.

Mas du Pont de Rousty, siège du Parc naturel régional de Camargue

Mas du Pont de Rousty, siège du Parc naturel régional de Camargue

Les églises

Les églises et abbayes témoignent de l’influence religieuse au c½ur du delta du Rhône.
Au 12e siècle, les religieux sont les premiers à construire au c½ur du delta mais leur implantation sera de courte durée. De leurs abbayes (Ulmet, Sylvéréal, La Trinité, Psalmody), il ne reste pratiquement rien. L’église fortifiée des Saintes-Maries-de-la-Mer est le plus remarquable des édifices religieux du delta qui compte par ailleurs de petites chapelles plus récentes dispersées sur toute sa superficie.

Eglise des Saintes-Maries-de-la-Mer © Jean Emmanuel Roché

Eglise des Saintes-Maries-de-la-Mer © Jean Emmanuel Roché

Les tours de guet

Le long des bras du Rhône, l’édification de tours de guets avait pour objectif de surveiller le delta . Elles permettaient ainsi d’assurer une protection contre les envahisseurs venus de la mer ou du fleuve (Tour de Constance et Tour Carbonnière à Aigues-Mortes). Certaines, construites plus tardivement du 15e au 18e siècle, permettaient le contrôle du commerce ou marquèrent un signe d’ascension sociale (Tour de Rougnouse, Tour d’Amphoux). Beaucoup sont encore visibles.

Tour de Vazel © Opus Species

Tour de Vazel © Opus Species

Les phares

Les phares constituent le patrimoine bâti du littoral Camarguais. Malgré d’importants risques d’échouage au large des côtes sableuses de Camargue (dans le golfe de Beauduc notamment), ils ne furent édifiés en Camargue qu’au 19e siècle : Faraman en 1835, l’Espiguette en 1869, La Gacholle en 1882, Faraman reconstruit en 1892. Au 20e siècle,  furent édifiés celui de Beauduc (1902) et de Fos-sur-Mer, le plus récent de France (1979).

Phare de Faraman © Jean Emmanuel Roché

Phare de Faraman © Jean Emmanuel Roché

Les châteaux

D’époque et de style variés, les châteaux sont dispersés dans le delta. La plupart ne sont pas ouverts au public (Armellière, Espeyran, Astouin). Le château d’Espeyran, propriété de l’Etat est le dépôt central des microfiches des archives nationales. Le château d’Avignon situé le long du petit Rhône est une propriété du Conseil général des Bouches-du-Rhône.

Château d'Avignon © Erick Henry

Château d'Avignon © Erick Henry

La cabane traditionnelle

Le roseau (Phragmites australis) constitue le matériau de base de construction des bergeries et des cabanes. Au 19e siècle et au début du 20e siècle les personnes de condition modeste — gardians, saliniers, ouvriers agricoles,bergers, paluniés — se contentent d’abris réalisés à partir des matériaux locaux, bois et roseau.

Des roseaux sont cousus par petites gerbes de dix centimètres de diamètre environ, les manons, sur une armature de bois.  La légèreté des matériaux utilisés oblige à tenir fortement compte des contraintes climatiques. Pour donner le moins de prise possible au vent, cabanes et bergeries sont orientées nord-ouest/sud-est et elles se terminent au nord-ouest, face au mistral, en arrondi. Pour un meilleur écoulement de l’eau, les deux versants de leur toiture sont fortement inclinés (45 %). En dehors de ces quelques constantes les cabanes présentent une grande variété : on construit au XIXe siècle aussi bien des murs en pierres, en roseaux nus ou en roseaux enduits de mortier de chaux, des toits terminés ou non par une croix, des murs avec ou sans fenêtre. Elles comportent une ou deux pièces et si elles mesurent en moyenne 4 à 5 mètres de large sur 7 à 8 de long et 3,50 mètres de hauteur, leurs dimensions peuvent être nettement plus importantes. (Courrier du Parc n° 50-51: M.-H. Sibille, nov. 1998).

L'histoire de l'église des Saintes-Maries-de-la-Mer

L’origine de l’église des Saintes-Maries-de-la-Mer reste mal connue. Les données archéologiques sur l’édifice ne sont pas fiables car les sources sont anciennes et leurs dires invérifiables. A cause de ce flou, bien souvent l’histoire de l’église et de son origine laissent le champ libre à une interprétation mélangeant le mythe et une possible réalité historique. On sait cependant qu’il y a eu destructions et reconstructions de différents sanctuaires de l’antiquité tardive jusqu’à l’époque médiévale. Cela permet de penser qu’un culte chrétien (peut-être d’origine païenne) existe dans ce lieu depuis très longtemps.

L’époque du Bas Empire romain correspondant au développement d’une primo chrétienté en Provence, cela pourrait expliquer la création d’un oratoire et d’un sanctuaire dans ce lieu. L’édifice actuel est fortifié au XIIIe et au XIVe siècle : on lui ajoute une couronne de mâchicoulis et un donjon crénelé. Une tour de guet est également placée au sommet de l’église : pendant la guerre de cent ans et longtemps après l’église servait de refuge à la population du village lors des attaques de pillards par les côtes. L’église est classée Monument Historique depuis 1840.

Pour en savoir plus sur le patrimoine bâti en Camargue

Lire : « Richesses et secrets de l’architecture en Camargue »

Cet ouvrage propose un panorama complet de l’architecture en Camargue. Grâce aux clés de compréhension de ces édifices, de leurs implantations, de leurs matériaux, c’est un voyage à travers le temps et la culture camarguaise qui vous est proposé. Vous découvrirez de quelle manière cette terre, souvent hostile, a influencé les choix architecturaux et à quel point les bâtiments sont adaptés à leur environnement.

Courrier  du Parc n°57 : coédition Parc naturel régional de Camargue et Ecole d’Avignon, septembre 2010, en vente auprès du Musée de la Camargue.